C’est bientôt le jour J : tu vas retrouver ton travail et tes collègues. Sauf que tu allaites et que tu n’as pas du tout envie d’arrêter. Sachant que le retour au travail a un réel impact sur la poursuite de l’allaitement, il est normal que tu te poses des questions. Comment faire pour continuer à allaiter à la reprise du travail ? Entre la possibilité de donner la tétée uniquement le matin et le soir et tirer ton lait la journée, et celle de passer en allaitement mixte, plusieurs solutions sont envisageables. Je te donne ici des conseils pour effectuer au mieux cette transition.

 

Allaitement et reprise du travail : ce que dit la loi

 

Selon le Code du Travail, toute salariée qui allaite son bébé bénéficie de dispositions particulières. Il est important que tu les connaisses pour faire valoir tes droits. Entre les employeurs qui ignorent la loi, ceux qui refusent de l’appliquer et ceux qui posent leurs conditions, tu vas avoir besoin d’arguments solides. Ci-dessous une check-list de ce que prévoit le Code du Travail.

  • Tu as le droit d’allaiter ton bébé au travail pendant 1 an à partir de sa naissance (articleL1225-30).
  • Ton temps de travail peut être réduit d’1h pour l’allaitement, répartie comme suit : 30 minutes le matin et 30 minutes l’après-midi.
  • Si ton employeur met à disposition un local dédié à l’allaitement, celui-ci doit respecter des normes strictes de sécurité et d’hygiène (les toilettes ne sont donc pas acceptables). Dans ce cas, la réduction de temps de travail passe à 20 minutes par session au lieu de 30.
  • Si l’entreprise compte plus de 100 salariées, ce local est obligatoire. Il peut être situé sur le lieu de travail ou à proximité.

Pour information, l’heure dédiée à l’allaitement est considérée comme du temps non travaillé et n’est donc pas rémunérée. Cependant, ta convention collective peut prévoir des dispositions plus avantageuses, je te conseille de la lire pour ne rien rater.

 

Poursuivre l’allaitement à la reprise du travail : mission pas impossible

 

La reprise du travail est un frein majeur à la poursuite de l’allaitement. Selon une enquête INPES/BVA de 2010, seules 24% des mères continuent à allaiter une fois qu’elles retournent travailler. La faute aux conditions pas toujours idéales :

  • peu ou pas de soutien professionnel ;
  • pas de lieu adapté pour l’allaitement ;
  • non-application du Code du Travail ;
  • difficulté d’organisation professionnelle et personnelle.

Pour autant, poursuivre l’allaitement après ton congé maternité est loin d’être impossible. Je ne te dis pas que ce sera facile, mais avec une bonne organisation tu ne seras pas obligée d’arrêter si tu ne le souhaites pas. Concrètement, il faudra prendre en compte deux points essentiels :

  • veiller à ce que ta lactation ne diminue pas ;
  • t’écouter : si à un moment tu te sens un peu fatiguée, c’est ok de réduire un peu le rythme.

Pour ce qui est du maintien de ta production de lait, si tu ne peux pas allaiter directement ton enfant pendant tes pauses (et c’est bien souvent le cas), tu devras tirer ton lait. En plus de stimuler ta lactation, cela évitera les désagréments des engorgements… et la gêne de te retrouver avec des auréoles de lait sur le chemisier.

 

Tirer son lait au travail

 

Pour maintenir ta lactation, tu vas devoir tirer ton lait dans la journée. Étant donné que tu ne disposeras que de 20 ou 30 minutes par demi-journée, je te conseille d’investir dans un tire-lait électrique à double-pompage, plus efficace et rapide qu’un tire-lait manuel ou à simple pompage.

Il faut compter environ 200 € pour un bon tire-lait. Cependant, tu peux aussi en louer un à la pharmacie. Demande une prescription médicale pour pouvoir être remboursée par la Sécurité Sociale. Depuis 2019, les prescriptions sont valables pour 10 semaines de location, renouvelables tous les 3 mois, aussi longtemps que nécessaire. L’avantage avec une location c’est que tu peux tester différents modèles avant ta reprise : comme ça tu es sûre d’en avoir un qui te convient le moment venu. La pharmacie pourra aussi te conseiller sur la taille des téterelles.

Pour faciliter le tirage, l’idéal est d’avoir un endroit calme et un minimum accueillant. Encore une fois, les toilettes ne conviendront pas, d’où l’importance de faire valoir tes droits auprès de ton employeur. Ensuite, tu peux stimuler ta lactation en regardant des photos de ton bébé ou en écoutant un enregistrement de ses babillements. Cela favorise la sécrétion d’ocytocine, l’hormone qui permet l’éjection du lait.

Concernant le transport, une glacière avec un pain de glace fera très bien l’affaire. S’il n’y a pas de frigo, ce sera également suffisant pour conserver ton lait toute la journée. S’il y en a un, veille à mettre tes contenants dans un sac fermé : comme ça ils ne se salissent pas et cela évite de froisser les collègues sensibles (certains sont dégoûtés par le lait maternel et tu es bien obligée de les respecter). Veille à prendre un petit sac pour transporter les téterelles et les biberons quand tu iras tirer ton lait. Pas besoin d’un système ultra sophistiqué : tu les glisses dans un sac de congélation fermé et tu mets le tout dans un sac en tissu. De retour à la maison, tu pourras congeler tout ça pour te faire un stock.

 

Conserver son lait maternel

 

L’avantage d’avoir un stock de lait est évident : en ayant de l’avance, tu es plus tranquille les jours où tu n’as pas le temps ou l’énergie de tirer ton lait. En pratique, tu peux simplement garder au congélateur, dans des poches adaptées, le lait que tu tires pendant ta journée de travail. Le matin avant de partir et le soir, tu peux mettre ton bébé au sein : tu n’es donc pas obligée d’utiliser ce que tu auras tiré. Le lait conservé servira pour la journée à la crèche ou chez la nounou.

Ceci étant dit, avoir un stock n’est pas une obligation. Tirer son lait régulièrement toute la journée et la nuit dans le seul but d’avoir une bonne avance peut être très contraignant. Et l’idée c’est de pouvoir continuer ton allaitement à moyen ou long terme. Si tu es fatiguée et stressée, si le rythme est trop intense, c’est contre-productif. Fonctionner au jour le jour, ça marche aussi : tu peux garder au frigo le lait du jour pour le lendemain.

Tu te demandes comment et combien de temps tu peux conserver ton lait ? Voici un tableau récapitulatif pour t’aider, il vient de chez hamstouille :

 

 

 

 

Allaiter après avoir repris le travail : connaître ses limites et se respecter

 

Allaiter ne doit pas devenir une contrainte. Si tu veux mener ton projet jusqu’au bout, il est important que ça reste un moment privilégié et agréable pour ton bébé et toi. Reprendre le travail signifie reprendre un rythme de vie plus soutenu. C’est normal d’être plus fatiguée et stressée.

Si c’est le cas, tu as le droit de ralentir la cadence et de respecter tes propres besoins. Dans ce cas, l’allaitement mixte est une bonne solution : tu gardes uniquement les tétées du matin et du soir, éventuellement celles de la nuit, et tu ne tires pas ton lait dans la journée. Chez la nounou ou à la crèche, ton bébé prendra des préparations pour nourrissons. Ta production de lait s’ajustera naturellement à ce nouveau rythme. Mais ça n’a pas à être définitif : si à un moment tu te sens prête à reprendre un allaitement exclusif, il y a des moyens de relancer ta lactation. Tu peux te rapprocher d’une association pour l’allaitement ou d’une consultante IBCLC pour t’accompagner dans la reprise.

En revanche, si le rythme te convient bien et que tu prends plaisir à poursuivre ton allaitement en alternant tétées matin et soir et expression de ton lait la journée, alors c’est parfait, continue.

 

Poursuivre l’allaitement à la reprise du travail est un sacré challenge dans une société où celui-ci n’est pas toujours valorisé. La clé pour pouvoir mener ton projet à bien, c’est l’organisation. Réfléchis en amont à ce que tu veux et ce qui conviendrait le mieux à ton rythme. Si tu t’en sens capable, fais valoir tes droits en tant que mère allaitante. Et surtout, écoute et respecte-toi : sans cela tu risques de t’épuiser et de devoir terminer ton allaitement sur une note d’amertume. Dans tous les cas, c’est génial que tu veuilles continuer à allaiter après le retour au bureau. Je te souhaite le meilleur et un allaitement aussi long et doux que tu le désires.

Pour aborder cette étape de la reprise du travail en toute sérénité, la sophrologie peut être une alliée précieuse, n’hésite pas à prendre rendez-vous.